Seconde partie du sondage « Pour un meilleur à venir » - Quatrième question ouverte


(par Myriam Delvenne)


L'étude menée en province de Liège par le Pôle Créatif Liégeois a été réalisée du 29 avril au 20 juin 2020 à l'occasion de la crise du COVID et du confinement qui en a résulté. La première partie avec les statistiques concernant les questions fermées ainsi que les trois premières questions ouvertes de la seconde partie sont parues les semaines précédentes (du 29 juin au 20 juillet).

Cette seconde et dernière partie comportait six questions en relation avec les réflexions des citoyens durant le confinement et après, à savoir :
  1. Depuis que je suis confiné(e), comment est-ce que je me sens ?
  2. Qu’est-ce que je ne fais plus dans mon quotidien ? Qu’est ce qui ne me manque pas, qui n’est finalement pas indispensable pour me sentir bien ?
  3. Quels sont les nouveaux gestes/comportements que j’ai mis en place que je souhaite conserver après le confinement ?
  4. Quelles sont les activités économiques maintenant suspendues que je ne souhaite pas voir reprendre ?
  5. Quelles sont les nouvelles activités/services que je souhaiterais voir se développer sur notre territoire/commune ?
  6. Qu’est-ce que le confinement m’a permis de (re)découvrir et que j’estime être une richesse, une valeur à cultiver dans ma vie ?
Le but était de découvrir si un changement de comportement s’était opéré sur cet échantillon de population habitant en province de Liège.

Chacune des six questions fera l’objet d’une analyse séparée. Aujourd’hui, nous allons analyser les réponses à la quatrième question.

Nous découvrons que les personnes sondées ont répondu à la question en englobant des activités économiques qui n’avaient pas été suspendues (exemple : vente de cigarettes). De plus, le mot « activités économiques » a été pris dans un sens plus large. Un certain nombre de réponses ne sont pas à proprement parler des activités économiques (exemple : politique et gouvernement).

Enfin, les personnes sondées ont évoqué plusieurs actions (parfois cinq différentes) à l'intérieur de la même réponse. Cela rend le nombre total de réponses plus élevé que l’échantillon (124).

Voici les résultats à la question : « Quelles sont les activités économiques maintenant suspendues que je ne souhaite pas voir reprendre ? »
  • Aucune : 43, distribué comme suit : 
    • Sans avis : 37 
    • Ne pas pénaliser les commerçants : 6
  • Surproduction et surconsommation : 18
  • Commerce international et mondialisation : 17
  • Trafic aérien : 16, distribué comme suit : 
    • Sans distinction : 8 
    • Vacances : 7 
    • Fret : 2 
    • Travail : 1
  • Centres commerciaux et grandes surfaces : 11
  • Pollution : 8, distribué comme suit : 
    • Sans distinction : 3 
    • Usines et industries : 4 
    • Bruit : 1
  • Restauration rapide : 6
  • Tourisme de masse : 5
  • Course au profit – monde de la finance : 4
  • Politique et gouvernement : 4
  • Cafés : 3
  • Culture de masse : 3
  • Commerces « dépanneurs » : 2
  • Magasins discount : 2
  • Croisières sur des paquebots géants : 2
  • Parcs d’attractions : 2
  • Travail : 2
  • Exploitation des ressources planétaires : 2
  • Commerces de mode et beauté : 1
  • Secteur de la construction : 1
  • Transport par route (camions) : 1
  • Voitures : 1
  • Démarchage téléphonique - porte à porte : 1
  • Publicité : 1
  • Vente de cigarettes : 1
  • Exploitation de la misère humaine : 1
  • Armement : 1
  • Guerres : 1
  • Activités inciviques : 1
  • Agressivité : 1
  • Rythme de vie effréné : 1
  • Vie compliquée : 1
  • Émissions de télévision (pas compréhensible) : 1
  • Réponse inappropriée (personne agressive) : 1
A la lumière des chiffres donnés ci-dessus, voici les conclusions que l’on peut tirer de l’analyse des réponses à la quatrième question ouverte :
  • Tout d’abord, il y a un peu plus d’un tiers des personnes sondées (34,7% - 43 personnes) qui n’ont pas donné une seule activité à supprimer définitivement. Beaucoup préfèrent s’abstenir de répondre (29,8% - 37 personnes), tandis que quelques-unes évoquent le fait de laisser tout le monde gagner sa vie (4,8% - 6 personnes), même si elles préfèreraient que certaines activités restent à l’arrêt.
  • La surconsommation et la surproduction sont les principales activités économiques que les personnes sondées voudraient voir disparaître (14,5% - 18 personnes). La consommation à outrance (12% - 15 personnes) est plus souvent évoquée que la surproduction (2,4% - 3 personnes).
  • Viennent ensuite le commerce international et la mondialisation, avec les délocalisations et le commerce en ligne (13,7% - 17 personnes). Bien que les mots « commerce international » et « mondialisation » semblent similaires, il est intéressant de clarifier ces deux concepts :
    • Le commerce international (8% - 10 personnes) se conçoit comme le simple fait d’échanger des marchandises avec des pays étrangers sans que les entreprises n’y soient forcément implantées, n’y disposent de filiales ou n’aient des relations élargies et étendues, sur une grande échelle. 
    • La mondialisation (8% - 10 personnes) se distingue du commerce international en ce sens qu’elle est davantage synonyme d’ouverture des frontières aux biens, aux services et aux personnes, de possibilités d’importation et d’exportation, d’implantation d’entreprises, d’investissements, plus ou moins facilités. La mondialisation permet aux groupes et multinationales de définir des stratégies mondiales, de production, de commercialisation, de financement, etc. Elle concerne donc des entreprises qui s’investissent davantage dans ce type de commerce, à l’échelle plus ou moins planétaire, éventuellement en délocalisant (2,4% - 3 personnes) leurs productions. Le commerce en ligne (1,6% - 2 personnes) fait également partie de la mondialisation.
Certains précisent leur pensée en parlant des importations de produits chinois, de matériel médical et de médicaments. Ces réponses sont dues à l’actualité concernant la crise sanitaire. En effet, les retards encourus ont été en partie dus à tous les secteurs de l’économie qui ont tourné au ralenti en Chine, puis en Europe.
  • Juste après, vient le trafic aérien (12,9% - 16 personnes). Une partie des personnes sondées ne détaille pas le type de transport (6,5% - 8 personnes) tandis que d’autres précisent s’il s’agit du transport de personnes dans le cadre de vacances (5,6% - 7 personnes), pour le travail (0,8% - 1 personne) ou du transport de marchandises (1,6% - 2 personnes).
  • Les centres commerciaux et grandes surfaces arrivent ensuite (8,9% - 11 personnes). Les personnes sondées ne veulent plus fréquenter ces types de magasins car elles considèrent qu'elles y font bien souvent des achats inutiles. Certaines personnes souhaiteraient que les magasins n’ouvrent plus le dimanche. Enfin, d’autres pointent du doigt le fait que les grandes surfaces tuent les petits commerces locaux.
  • La pollution est ensuite évoquée (6,5% - 8 personnes). Trois personnes (2,4%) parlent de pollution en général, quatre (3,2%) se plaignent des usines et des industries, tandis que la dernière (0,8%) se plaint de la pollution sonore.
  • Puis, les personnes sondées parlent respectivement de la restauration rapide, McDonald’s et autres fast-foods (4,8% - 6 personnes) et du tourisme de masse (4,0% - 5 personnes), sans évoquer le mode de transport utilisé. Comme il ne s’agit pas nécessairement de l’avion, j’ai préféré faire une distinction. D’autant plus que les voyages en avion pour raisons touristiques ne sont pas nécessairement du tourisme de masse. Il y a des régions du monde très peu touristiques où prendre l’avion est une nécessité. De même, il y a des régions proches qui sont victimes du tourisme de masse alors que l’on peut s’y rendre en voiture ou en train.
  • Avec 3,2% et 4 personnes sondées pour chacune des deux propositions, nous trouvons la course au profit et le monde de la finance, ainsi que la politique et le gouvernement. Voici ce qui est reproché à nos chers politiciens : une politique à deux vitesses, un trop grand nombre de ministres et beaucoup de mauvaise foi. Comme indiqué plus haut, ce dernier point n’est ni une activité économique, ni une activité suspendue durant la période de confinement. Elle indique cependant une certaine défiance des citoyens à l’égard du monde politique. De même, les marchés boursiers n’ont pas cessé leurs activités durant la crise. Après avoir plongé au tout début, ils ont connu un regain spectaculaire. De plus, certaines sociétés ont profité de la crise pour s’enrichir en vendant des produits comme le gel hydroalcoolique à des prix beaucoup trop élevés. La course au profit est toujours une réalité, surtout en temps de crise.
  • Pour les personnes sondées, les cafés (3) et la culture de masse (3) telle que les festivals ne sont plus nécessaires, à raison de 2,4 % pour chacune des deux activités. La peur de la contamination est responsable de ces réponses car ce sont des endroits où la promiscuité est plus importante. Curieusement, les restaurants n’ont pas été cités.
  • Les commerces « dépanneurs », tels que des magasins de type « night shop » ne plaisent plus à 1,6% des personnes sondées (2). Le même nombre de personnes a choisi de parler des magasins de type discount, déstockage ou solderie qu’elles préféreraient ne plus voir.
  • Deux personnes sondées souhaiteraient la disparition des croisières sur des paquebots géants (1,6%). Les parcs d’attractions pourraient ne pas rouvrir pour deux autres personnes.
  • Le travail tel qu’il est conçu à l’heure actuelle ne plaît plus à deux personnes sondées. C’est probablement dû au fait que ces dernières ont goûté aux joies du télétravail.
  • Pour en terminer avec le même pourcentage (1,6%), deux personnes sondées souhaiteraient que cesse l’exploitation des ressources planétaires. Cette préoccupation écologique est précisée de la manière suivante : il est demandé de mettre fin à l’agriculture intensive, à la déforestation et à l’exploitation des ressources pétrolières.
Les derniers points ont tous reçu une seule réponse (0,8% des personnes sondées). Je les listerai simplement en donnant quelques explications si nécessaire.
  • Il s’agit des commerces de mode et beauté. Ce secteur recouvre les salons de coiffure, d’esthétique, les boutiques de vêtements et accessoires. La personne précise qu’elle ne souhaite pas qu’ils reprennent leurs activités pour raisons sanitaires. Cela nous apprend que cette personne n’a pas compris le sens de la question, c’est-à-dire que nous souhaitions savoir ce que les personnes ne voulaient pas voir redémarrer après la crise et le confinement.
  • Une personne parle du secteur de la construction. En effet, on construit beaucoup de nouveaux immeubles alors que d’autres sont laissés à l’abandon. Ces constructions se font au détriment de la nature qui perd de plus en plus de terrain.
  • Une autre personne souhaiterait voir disparaitre le transport par route et tout son lot de camions qui provoquent des embouteillages. Pour les mêmes raisons, une personne sondée aimerait que l’on n'utilise plus la voiture.
  • Le démarchage téléphonique et le porte-à-porte gênent une des personnes sondées.
  • Pour une autre, c’est la publicité dans les espaces publics qu'il faudrait supprimer.
  • La vente de cigarettes ennuie un des sondés. Pourtant, cette activité n’a jamais été suspendue.
Ici, il n’est plus du tout question d’activités économiques, mais d’aspirations afin que ces problèmes se résolvent rapidement : il y a l’exploitation de la misère humaine, l’armement, les guerres, les activités inciviques, l’agressivité, le rythme de vie effréné et la vie compliquée.

Deux réponses m’ont semblé difficilement exploitables. Une personne parle des émissions de télévision. A quelle question pense-t-elle répondre ? Les émissions n’ayant pas cessé, espère-t-elle ne plus les regarder parce que cela la stresse ? Sans plus d’éclaircissement, impossible de classer cette réponse, ni de la commenter.

Une des personnes a répondu de manière agressive à tout le questionnaire. Certaines réponses étaient inexistantes. A celle-ci, elle s’est défoulée en disant qu’elle ne participerait pas à l’effort collectif. Non seulement elle ne répond pas à la question, mais en plus, elle montre son manque de solidarité envers les autres.

Je terminerai par le commentaire très interpellant d’une des personnes sondées :

Grave et complexe question. Qui mérite des états-généraux de la Wallonie, avec spécialistes et dossiers.
Globalement, j'aimerais qu'on se pose toujours quelques questions à chaque fois qu'on invente quelque chose ou qu'on prend une initiative économique, par exemple :
  • A quoi ça va servir ?
  • Et à qui ?
  • Qu'est-ce que ça peut détruire (santé, nature, liens sociaux) ?
  • C'est conçu pour durer ?
  • A qui ça rapporte ?
  • Et suspendre où ?
  • Chez nous ou au niveau mondial ?
Il est moins essentiel de supprimer que de modérer ou de contrôler…
... À MÉDITER !




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